Lien vers: le conte a l'age classique

Lien vers: Menu principal

Conteuses et conteurs

Portrait de Charles Perrault. Gravure par Baudet d'apres le portrait peint par Le Brun en 1665 Si quelques hommes se sont risqués à écrire des contes de fées (comme le chevalier de Mailly, Préchac ou Perrault), ce sont surtout les dames qui ont excellé dans cet exercice, comme Mme d'Aulnoy, Mme de Murat ou Mlle Lhéritier. Tous les contes de ces auteurs, et de bien d'autres, seront reproduits dans la "Bibliothèque des Génie et des Fées".

 

 

Madame d'Aulnoy

Marie Catherine Le Jumel de Barneville, baronne d'Aulnoy (1650-1705) fut une aventurière et une intrigante, contrainte de s'exiler pour échapper à la justice française. Mais surtout, elle a inventé le conte de fées littéraire: le premier d'entre eux est en effet "L'Île de la Félicité", inséré dans l'Histoire d'Hipolite, comte de Douglas (1690), et qui reprend le thème folklorique du "pays où l'on ne meurt pas". Dès lors, la mode est lancée. Elle-même publie des recueils de contes de fées - huit volumes entre 1697 et 1698, intitulés Contes des fées, Contes nouveaux ou Les Fées à la mode ). Ces histoires n'ont plus grand'chose à voir avec le prétexte folklorique censé les inspirer: son univers féerique ressemble bien plus aux salons des Précieuses qu'aux veillées paysannes. Par la place qu'ils accordent au sentiment et au savoir-vivre de leurs héros, les contes de Mme d'Aulnoy illustrent la transformation du conte en genre galant et mondain.

 

Charles Perrault

Portrait de Perrault On ne présente plus Charles Perrault (1628-1703). Né dans une famille de parlementaires jansénistes, Contrôleur des bâtiments royaux, il s'aperçut très vite que la littérature était sa véritable vocation. Académicien, engagé dans la querelle des Anciens et des Modernes, il aurait été surpris de constater que la postérité le connaît surtout à cause d'un mince recueil de contes de fées, paru en 1697, dans lequel il a regroupé huit contes, sous le titre de Histoires ou contes du temps passé, avec des moralités.

Le succès est immédiat et ne se démentira plus jamais, comme l'attestent les trois rééditions, du vivant même de l'auteur.

Cette fortune durable ne s'est maintenue que grâce à des malentendus.

Le premier concerne le public visé: le recueil fut conçu par l'auteur comme un livre pour des adultes, capables de percevoir les allusions à la société du XVIIe siècle et les sous-entendus grivois. D'ailleurs, excepté le Petit chaperon rouge, tous les récits de Perrault sont tirés du répertoire populaire des contes pour adultes. Ce n'est qu'à partir de 1833 (loi Guizot sur l'enseignement primaire) que les pédagogues ont voulu voir dans les Contes du passé un livre pour l'éducation de la jeunesse.

 

Peau d'âne (image de Metz) Le deuxième malentendu concerne le statut littéraire de ces histoires: appartiennent-elles à la culture populaire ou à la culture savante? Au XIXe siècle, les folkloristes, qui découvrent le patrimoine de la littérature orale, sont frappés par la "trahison" du matériau populaire par Perrault: certes, il utilise des procédés qui semblent relever de l'oralité (formulettes, structures syntaxiques simples, vocabulaire archaïque...), mais il s'agit en fait d'une oralité reconstruite et totalement artificielle, et Perrault, qui ne se soucie pas de vérité par rapport à son original folklorique, songe bien davantage à son public de belles dames cultivées.

Que penser de cette réécriture? Certains, dans la lignée des folkloristes du XIXe siècle, considéreront que Perrault a mis une perruque poudrée aux contes et qu'il leur a fait perdre leur saveur, leur richesse et leur authenticité; d'autres estimeront au contraire qu'il a réussi à conférer à ces récits populaires une dignité littéraire et qu'il les a préservés de l'oubli, en leur permettant d'atteindre une célébrité exceptionnelle qu'ils n'auraient pas connu sans lui. C'est une affaire de goût personnel.

Premiere page de l'edition originale de Peau d'ane (1694)

 

  Mlle Lheritier

Portrait de Marie-Jeanne Lhéritier Marie-Jeanne Lhéritier de Villandon (1664-1734), nièce de Charles Perrault, demeura étroitement liée au conteur dont elle partagea les sympathies et les goûts.

Elle fut reçue à l'Académie de Toulouse, tint salon, et fut l'amie de Mme Déshoulières et Madeleine de Scudéry. Elle collabora au Mercure galant, et prit le parti des "Modernes", dont le chef de file était son oncle Perrault.

Elle composa des contes, qui furent publiées dans son recueil d'Oeuvres mêlées paru en 1695: "l'adroite princesse ou les Aventures de Finette" (qu'on prit parfois pour un texte de son oncle) et "Les enchantements de l'éloquence ou les effets de la douceur", nouvelle dont Marc Fumaroli a montré qu'elle constituait la clef d'interprétation du conte "Les Fées", de Charles Perrault.

<<< Lien vers: page precedente