PRÉVENTION DES MAUVAIS TRAITEMENTS À L'ÉGARD DES ÉLÈVES

Circulaire n° 97-119 du 15 mai 1997
(Education nationale, Enseignement supérieur et Recherche : bureaux DEC 2, DLC D1, Enseignements supérieurs)

Texte adressé aux recteurs, au directeur de l'académie de Paris, aux inspecteurs d'académie, directeurs des services départementaux de l'Education nationale, aux directeurs des IUFM, aux chefs des MAFPEN, aux inspecteurs de l'Education nationale, aux chefs d'établissement et aux directeurs d'école.

NOR : MENE9701474C


références : loi n° 89-487 du 10 juillet 1989 ; décret du 9 décembre 1991 ; circulaire interministérielle n° 95-20 du 3 mai 1995 ; décret n° 97-216 du12 mars 1997.Texte abrogé : circulaire n° 83-241 du 24 juin 1983.

La protection des enfants maltraités constitue un enjeu social essentiel. La maltraitance d'enfants, pour autant qu'elle puisse être cernée, touche un nombre important d'enfants : en 1995, on estime que vingt mille enfants en étaient l'objet.

La politique engagée en France repose notamment sur la nécessité d'informer et de former les adultes en relation avec les enfants pour qu'ils sachent entendre et comprendre les élèves, avertir les autorités compétentes.

L'Education nationale a en ce domaine une fonction déterminante. Ses personnels, en contact permanent avec les enfants, ont une obligation de vigilance et doivent être informés des signes révélateurs de maltraitance, mauvais traitements et atteintes sexuelles, et des comportements à adopter lorsque le cas se présente. Il incombe également à l'école de participer à la prévention par les actions d'information qu'elle conduit auprès des élèves.

Le cadre législatif et réglementaire existe :

La loi n° 89-487 du 10 juillet 1989 relative à la prévention des mauvais traitements à l'égard des mineurs et à la protection de l'enfance a été précisée par le décret du 9 décembre 1991 (RLR 722-6) en ce qui concerne la formation des professionnels ; la circulaire interministérielle no 95-20 du 3 mai 1995 (ci-avant) a établi le cadre et les modalités de mise en oeuvre des programmes d'action concernant les différents départements ministériels qui composent le groupe permanent interministériel pour l'enfance maltraitée (GPIEM). Cette instance, déjà mise en place par circulaire, vient de voir son existence réglementairement confirmée par le décret no 97-216 du 12 mars 1997 relatif à la coordination interministérielle en matière de lutte contre les mauvais traitements et atteintes sexuelles envers les enfants et son arrêté d'application de la même date (RLR 123-1).

La présente circulaire a pour objet d'améliorer les conditions de prévention des mauvais traitements à l'égard des élèves, en précisant, d'une part, les implications pour les personnels de l'Education nationale et, d'autre part, les liaisons avec les partenaires extérieurs, notamment en matière de signalement.

I. MOBILISER ET FORMER LES PERSONNELS
DE L'ÉDUCATION NATIONALE

La prévention de la maltraitance, au-delà des structures qu'elle implique, ne saurait se passer de la mobilisation des personnels dans le cadre d'une collaboration entre les différents services concernés et d'une explicitation de leurs rôles respectifs.

Il appartient aux recteurs et aux inspecteurs d'académie d'impulser la politique nécessaire en ce domaine, avec l'appui de leurs conseillers techniques médicaux et sociaux et d'organiser notamment la mise en oeuvre d'actions de sensibilisation et de formation destinées aux personnels de l'Education nationale.

L'administration centrale en évalue les résultats en procédant à l'analyse des informations transmises par chaque académie.

I.1. Mobilisation des Personnels de l'Education Nationale

Le dispositif de prévention de la maltraitance mis en oeuvre par les recteurs et les inspecteurs d'académie implique une collaboration étroite avec les chefs d'établissement, les inspecteurs de l'Education nationale, les directeurs d'école, les réseaux d'aide spécialisée pour les élèves en difficulté et, bien entendu, en tout premier lieu les personnels sociaux et de santé.

Dans les établissements scolaires, des programmes d'actions destinées aux élèves doivent être mis en oeuvre dans le cadre du projet d'école ou d'établissement. En outre, il convient de le rappeler, l'affichage des coordonnées du service téléphonique " allô enfance maltraitée " (no 119) est obligatoire dans tous les établissements et services recevant habituellement des mineurs.

I.2. Formation des Personnels de l'Education Nationale

L'article 4 de la loi précitée a posé le principe de l'obligation de formation des professionnels concernés, notamment des enseignants, aux questions relatives à la maltraitance des mineurs. Le décret du 9 décembre 1991 a précisé les thèmes sur lesquels doit porter cette formation : les causes des mauvais traitements, le repérage, le cadre juridique et institutionnel de la protection de l'enfance, les modalités d'intervention, la prévention, l'évaluation. Il convient que ces formations se développent tant pour les personnels du premier degré que du second degré, tant au niveau de la formation initiale que de la formation continue.

a) Formation initiale des enseignants du premier et du second degrés

Les instituts universitaires de formation des maîtres (IUFM), prennent en compte les thèmes précités dans les cursus de formation de deuxième année pour tous les futurs professeurs des écoles, des collèges et des lycées.

L'objectif est de les préparer, dans le cadre de leur mission éducative, à contribuer à la prévention de la maltraitance, à savoir identifier des situations de maltraitance dont peuvent être victimes leurs élèves, à faire en sorte qu'ils sachent qui, quand et comment alerter et qu'ils puissent agir de façon adaptée à l'égard des élèves concernés.

Cette prise en compte se fait de deux manières :

La première, en assurant une information et une sensibilisation à ces questions dans le cadre des actions de formation présentes dans tous les plans de formation portant sur l'éducation à la santé, le cadre juridique et institutionnel de la protection des mineurs, la connaissance de la psychologie et de la physiologie de l'enfant et de l'adolescent, la connaissance de l'environnement et de la diversité des élèves ;

La seconde, en s'attachant à développer dans l'ensemble des activités de formation les aptitudes et les compétences fondamentales qui leur permettront d'être attentifs à ce type de risques, d'être des relais d'information et de communication efficaces et d'apporter une contribution adaptée au travail d'équipe dans l'établissement avec les autres personnels et les partenaires extérieurs.

b) Formation continue

Sous l'autorité des recteurs et inspecteurs d'académie, les missions académiques de formation des personnels de l'Education nationale (MAFPEN) pour les personnels enseignants et les centres académiques de formation administrative (CAFA) pour les personnels médicaux et sociaux s'attacheront à proposer des stages sur ce thème. Il est nécessaire que les plans académiques et départementaux de formation intègrent systématiquement ce type d'actions. Afin de faciliter leur mise en oeuvre, de nouveaux outils à destination des formateurs sont en cours d'élaboration au niveau national.

De même, des formations d'initiative nationale inscrites au plan national de formation sont organisées afin de répondre aux besoins académiques en ce domaine.

Par ailleurs, la formation des directeurs d'école et des personnels de direction et d'éducation des établissements secondaires doit mettre en évidence leurs responsabilités et obligations en ce domaine et leur permettre de connaître les modes de prise en charge de la maltraitance ainsi que les interlocuteurs compétents.

II. LIAISONS

II.1. LIAISONS AVEC LES COLLECTIVITÉS LOCALES, AVEC LES AUTRES SERVICES DE L'ETAT, AVEC LES ASSOCIATIONS

La mise en oeuvre de la politique de prévention des mauvais traitements et des abus sexuels, qui s'inscrit dans le même cadre général que la politique de prévention de la violence en milieu scolaire défini par la circulaire interministérielle no 96-135 du 14 mai 1996 (RLR 552-4), implique que soient associés l'ensemble des services publics de l'Etat, les collectivités locales et les associations intéressées à la protection de l'enfance. Cette situation conduit au rappel ou à la définition des règles de fonctionnement du partenariat.

a) Liaisons avec les collectivités locales et les autres services de l'Etat

Au niveau départemental, le président du Conseil général est responsable de la politique de prévention des mauvais traitements à l'égard des mineurs. En effet, conformément à l'article 68 du Code de la famille et de l'aide sociale, " le président du Conseil général met en place, après concertation avec le représentant de l'Etat dans le département, un dispositif permettant de recueillir en permanence les informations relatives aux mineurs maltraités et de répondre aux situations d'urgence selon les modalités définies en liaison avec l'autorité judiciaire et les services de l'Etat dans le département ".

Il appartient à l'inspecteur d'académie de prendre l'attache du président du Conseil général afin de préciser dans quelles conditions son action s'intègre au dispositif que prévoit l'article 68 précité. Il apparaît, en effet, que la mise en oeuvre effective des actions de prévention ou de traitement de la maltraitance est facilitée par la signature d'une convention entre les parties concernées, soit au minimum le président du Conseil général, les autorités judiciaires et l'inspecteur d'académie.

b) Liaisons avec les associations

Certaines associations agréées par l'Education nationale, le Conseil général ou par les services du ministère de la Justice participent aux actions de prévention de la maltraitance. A ce titre, elles peuvent être amenées, à la demande des autorités académiques ou avec leur accord, à intervenir auprès de la communauté éducative dans le cadre d'actions de sensibilisation auprès des élèves ou de formations des personnels. Leur action doit s'inscrire dans le dispositif académique ou départemental de prévention de la maltraitance.

A cette fin, ces associations devront passer une convention selon leur champ d'intervention, avec le recteur ou l'inspecteur d'académie ou le chef d'établissement du second degré (voir modèle de convention en annexe).

Il appartiendra aux recteurs, aux inspecteurs d'académie et aux chefs d'établissements après avis des conseillers techniques médicaux et sociaux, de juger du caractère adapté et opportun des actions concrètes à mettre en oeuvre dans les établissements. Ces conseillers techniques donneront leur avis notamment sur la pertinence des propositions émanant des partenaires associatifs.

II.2. LA PROCÉDURE DE SIGNALEMENT

La communication des cas de mauvais traitements et privations s'impose, comme à tout citoyen, aux personnels des établissements scolaires ; le fait de ne pas porter ces informations à la connaissance des autorités judiciaires ou administratives constitue un délit pénal (article 434-3 du Code pénal).

Cette communication, communément appelée le signalement, prend des formes différentes selon qu'il s'agit d'une présomption de maltraitance nécessitant une enquête préalable ou d'un cas d'urgence :

En cas de présomption de maltraitance : le président du Conseil général est saisi, l'inspecteur d'académie informé de cette saisine ;

En cas d'urgence c'est-à-dire lorsque les personnels sont confrontés à une situation de maltraitance grave et manifeste : le procureur de la République est saisi, l'inspecteur d'académie et le président du Conseil général sont informés.

Dans tous les cas, les procédures de saisine sont mises en oeuvre immédiatement ; je vous rappelle qu'à tout moment il peut être fait appel en ce domaine aux personnels sociaux et de santé à même d'évaluer une situation.

Il est indispensable que les personnels soient clairement informés des modalités précises de signalement retenues dans chaque département. A cet égard, l'expérience de ces dernières années fait apparaître comme tout à fait utile d'inclure les modalités précises de signalement dans la convention citée au II.1 a) et de les porter à la connaissance de tous les personnels.

Je vous demande de respecter l'ensemble de ces dispositions visant à assurer la protection de l'enfance et la prévention de la maltraitance dans le cadre d'une meilleure coordination générale des services de l'Education nationale, ainsi que des autres départements ministériels concernés.

La circulaire n°83-241 du 24 juin 1983 est abrogée.

(BO n° 21 du 22 mai 1997.)

Annexe : CONVENTION TYPE

Entre :

Le recteur de l'académie de
ou
L'inspecteur d'académie, directeur des services départementaux de l'Education nationale de
ou
Le chef d'établissement du second degré de
et
L'association (préciser le cadre de l'agrément).

Il a été convenu ce qui suit :

Article premier. - Définition de l'action d'information ou de sensibilisation des élèves.

Art. 2. - Conditions de préparation préalables avec le service social en faveur des élèves (avec présentation notamment des documents et le cas échéant des matériels vidéo qui seront utilisés).

Art. 3. - Conditions générales d'organisation : nombre de séquences, durée...

Art. 4. - Qualité des intervenants.

Art. 5. - Les partenaires s'engagent à travailler dans le respect des règles déontologiques, sous la responsabilité pédagogique des personnels enseignants concernés.

Art. 6. - La participation des écoles, collèges et lycées repose sur le volontariat.

Art. 7. - La convention est signée pour une durée d'un an. Elle est renouvelable. Elle peut être dénoncée avant son terme, soit par accord entre les parties, soit à l'initiative de l'une d'entre elles. Dans ce dernier cas, la dénonciation doit faire l'objet d'un préavis motivé d'un mois.

Signatures :